L’âme humaine ne connaît pas le corps humain lui-même, et ne sait qu’il existe que par les idées des affections qu’il éprouve.

Démonstration

En effet, l’âme humaine, c’est l’idée même ou la connaissance du corps humain (par la Propos. 12), laquelle est en Dieu (par la Propos. 9), en tant qu’on le considère comme affecté de l’idée d’une autre chose particulière, ou bien, en tant que le corps humain a besoin de plusieurs autres corps dont il est continuellement comme régénéré ; or, l’ordre et la connexion des idées est le même (par la Propos. 7) que l’ordre et la connexion des causes. Cette idée sera donc en Dieu en tant qu’on le considère comme affecté des idées de plusieurs choses particulières. Par conséquent, si Dieu a l’idée du corps humain, ou autrement, si Dieu connaît le corps humain, c’est en tant qu’il est affecté de plusieurs autres idées, et non en tant qu’il constitue la nature de l’âme humaine ; en d’autres termes (par le Corollaire de la Propos. 11), l’âme humaine ne connaît pas le corps humain. Mais, d’un autre côté, les idées des affections du corps sont en Dieu, en tant qu’il constitue la nature de l’âme humaine ; ou autrement, l’âme humaine perçoit ces mêmes affections (par la Propos. 12) ; et en conséquence (par la Propos. 16) elle perçoit le corps humain lui-même ; et enfin elle le perçoit (par la Propos. 17) comme existant en acte. C’est donc de cette façon seulement que l’âme humaine perçoit le corps humain lui-même. C. Q. F. D.