Les choses qui sont, par accident, des causes d’espérance ou de crainte, on les nomme bons ou mauvais présages. Ces présages, en tant qu’ils sont pour nous des causes d’espérance ou de crainte, le sont en même temps de joie ou de tristesse (Par les Déf. de l’espérance et de la crainte, qu’on trouve au Scol. 2 de la Propos. 18), et en conséquence (par le corollaire de la propos. 15) nous avons pour eux de l’amour et de la haine, et nous faisons effort (par la Propos. 28) soit pour les employer comme moyens d’atteindre l’objet de nos espérances, soit pour les écarter comme des obstacles et des causes de crainte. En outre, il suit de la Propos. 25, que la constitution naturelle de l’homme est telle qu’il croit facilement ce qu’il espère et difficilement ce qu’il appréhende, et que nos sentiments, à cet égard, sont toujours en deçà ou au delà de ce qui est juste. Telle est l’origine de ces superstitions qui en tout lieu tourmentent les humains.
Du reste, je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’expliquer ici les fluctuations qui proviennent de l’espérance et de la crainte, puisqu’il résulte de la seule définition de ces passions que l’espérance ne va pas sans la crainte, ni la crainte sans l’espérance (comme nous l’expliquerons plus amplement en son lieu) ; et comme il arrive, en outre, que nous avons toujours de l’amour ou de la haine pour un objet, en tant que nous l’espérons ou le redoutons, il s’ensuit que tout ce que nous avons dit sur l’amour et la haine, chacun peut aisément l’appliquer à l’espérance et à la crainte.