Cette idée qui exprime l’essence du corps sous le caractère de l’éternité est, comme nous l’avons dit, un mode déterminé de la pensée qui se rapporte à l’essence de l’âme et qui est nécessairement éternel. Et cependant il est impossible que nous nous souvenions d’avoir existé avant le corps, puisque aucune trace de cette existence ne se peut rencontrer dans le corps, et que l’éternité ne peut se mesurer par le temps, ni avoir avec le temps aucune relation. Et cependant nous sentons, nous éprouvons que nous sommes éternels. L’âme en effet, ne sent pas moins les choses qu’elle conçoit par l’entendement que celles qu’elle a dans la mémoire. Les yeux de l’âme, ces yeux qui lui font voir et observer les choses, ce sont les démonstrations. Aussi, quoique nous ne nous souvenions pas d’avoir existé avant le corps, nous sentons cependant que notre âme, en tant qu’elle enveloppe l’essence du corps sous le caractère de l’éternité, est éternelle, et que cette existence éternelle ne peut se mesurer par le temps on s’étendre dans la durée. Ainsi donc, on ne peut dire que notre âme dure, et son existence ne peut être enfermée dans les limites d’un temps déterminé qu’en tant qu’elle enveloppe l’existence actuelle du corps ; et c’est aussi à cette condition seulement qu’elle a le pouvoir de déterminer dans le temps l’existence des choses et de les concevoir sous la notion de durée.