« Chaque fois que le désir est trahi, maudit, arraché à son champ d’
immanence, il y a un prêtre là-dessous. Le prêtre a lancé la triple
malédiction sur le désir : celle de la loi négative, celle de la règle
extrinsèque, celle de l’idéal transcendant. Tourné vers le nord, le prêtre a
dit : Désir est manque (comment ne manquerait-il pas de ce qu’il désire ?).
(.) Puis, tourné vers le sud, le prêtre a rapporté le désir au plaisir. Car
il y a des prêtres hédonistes et même orgastiques. (.) Le plaisir-décharge :
le prêtre opère le second sacrifice nommé masturbation. Puis, tourné vers l’
est, il s’écrie : Jouissance est impossible, mais l’impossible jouissance est
inscrite dans le désir. Car tel est l’Idéal, en son impossibilité même, « le
manque-à-jouir qu’est la vie ». (.) La figure la plus récente du prêtre est
le psychanalyste avec ses trois principes, Plaisir, Mort et Réalité. »
(Gilles Deleuze et Félix Guattari, Capitalisme et schizophrénie, tome 2 :
Mille plateaux, Ed. de Minuit, 1980, pp.191-192.)