EII - Proposition 8 - scolie

  • 12 avril 2004

Si quelqu’un désire un exemple pour expliquer plus amplement ce point, je n’en pourrai certes donner aucun qui explique adéquatement la chose dont je parle ici, attendu qu’elle est unique ; je m’efforcerai cependant d’illustrer ce point comme il se peut faire : un cercle est, on le sait, d’une nature telle que les segments formés par toutes les lignes droites se coupant en un même point à l’intérieur donnent des rectangles équivalents ; dans le cercle sont donc contenues une infinité de paires de segments d’égal produit ; toutefois, aucune d’elles ne peut être dite exister si ce n’est en tant que le cercle existe, et, de même, l’idée d’aucune de ces paires ne peut être dite exister, si ce n’est en tant qu’elle est comprise dans l’idée du cercle. Concevons cependant que de cette infinité de paires deux seulement existent, savoir D et E. Certes leurs idées existent alors non seulement en tant que comprises dans l’idée du cercle, mais aussi en tant qu’elles enveloppent l’existence de ces paires de segments ; par où il arrive qu’elles se distinguent des autres idées des autres paires. [*]


SCHOLIUM :

Si quis ad uberiorem hujus rei explicationem exemplum desideret, nullum sane dare potero quod rem de qua hic loquor, utpote unicam adæquate explicet ; conabor tamen rem ut fieri potest, illustrare. Nempe circulus talis est naturæ ut omnium linearum rectarum in eodem sese invicem secantium rectangula sub segmentis sint inter se æqualia ; quare in circulo infinita inter se æqualia rectangula continentur : attamen nullum eorum potest dici existere nisi quatenus circulus existit nec etiam alicujus horum rectangulorum idea potest dici existere nisi quatenus in circuli idea comprehenditur. Concipiantur jam ex infinitis illis duo tantum nempe E et D existere. Sane eorum etiam ideæ jam non tantum existunt quatenus solummodo in circuli idea comprehenduntur sed etiam quatenus illorum rectangulorum existentiam involvunt, quo fit ut a reliquis reliquorum rectangulorum ideis distinguantur.


[*(Saiiset) : Si quelqu’un désire que je prenne ici un exemple pour que la chose devienne plus claire, j’avoue que je n’en puis fournir aucun qui en donne une explication adéquate, car c’est une chose unique en son espèce ; je vais tâcher pourtant de l’éclaircir autant que possible. Un cercle est tel de sa nature que si plusieurs lignes se coupent dans ce cercle, les rectangles formés par leurs segments sont égaux entre eux ; cependant on ne peut dire qu’aucun de ces rectangles existe si ce n’est en tant que le cercle existe ; et l’idée de chacun de ces rectangles n’existe également qu’en tant qu’elle est comprise dans l’idée du cercle. Maintenant, concevez que de tous ces rectangles en nombre infini deux seulement existent, les rectangles E et D. Dès lors, les idées de ces rectangles n’existent plus seulement en tant qu’elles sont comprises dans l’idée du cercle, mais elles existent aussi en tant qu’elles enveloppent l’existence des deux rectangles donnés, ce qui distingue ces idées de celles de tous les autres rectangles.

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