TRE - 34

  • 16 septembre 2005


Pierre par exemple est un objet réel ; l’idée vraie de Pierre est l’essence objective de Pierre, et en elle-même elle est aussi quelque chose de réel qui est entièrement distinct de Pierre lui-même. Puis donc que l’idée de Pierre est quelque chose de réel, elle sera aussi l’objet d’une autre idée qui contiendra objectivement en elle tout ce que l’idée de Pierre contient formellement, et à son tour cette idée, qui aura pour objet l’idée de Pierre, aura aussi son essence qui pourra de même être l’objet d’une nouvelle idée, et ainsi indéfiniment. Chacun peut l’éprouver en voyant que, sachant ce qu’est Pierre il sait aussi qu’il sait, et encore sait qu’il sait qu’il sait, etc. Il est constant par là, que pour connaître l’essence de Pierre, il n’est pas nécessaire que l’entendement connaisse l’idée même de Pierre et, encore moins, l’idée de l’idée de Pierre ; ce qui revient à dire que je n’ai pas besoin pour savoir, de savoir que je sais, et encore bien moins de savoir que je sais que je sais ; pas plus que pour connaître l’essence du triangle il n’est besoin de connaître celle du cercle [1]. C’est le contraire qui a lieu dans ces idées : pour savoir que je sais, il est nécessaire que je sache d’abord.


Petrus ex. gr. est quid reale ; vera autem idea Petri est essentia Petri obiectiva, et in se quid reale, et omnino diversum ab ipso Petro. Cum itaque idea Petri sit quid reale habens suam essentiam peculiarem, erit etiam quid intelligibile, id est, obiectum alterius ideae, quae idea habebit in se obiective omne id, quod idea Petri habet formaliter, et rursus idea, quae est ideae Petri, habet iterum suam essentiam, quae etiam potest esse obiectum alterius ideae, et sic indefinite. Quod quisque potest experiri, dum videt se scire, quid sit Petrus, et etiam scire se scire, et rursus scit se scire, quod scit etc. Unde constat, quod, ut intelligatur essentia Petri, non sit necesse, ipsam ideam Petri intelligere, et multo minus ideam ideae Petri ; quod idem est, ac si dicerem, non esse opus, ut sciam, quod sciam me scire, et multo minus esse opus scire, quod sciam me scire ; non magis, quam ad intelligendam essentiam trianguli opus sit essentiam circuli intelligere. [2] Sed contrarium datur in his ideis. Nam ut sciam me scire, necessario debeo prius scire.



[1On observera que nous ne cherchons pas ici comment la première essence objective nous est donnée de naissance ; cette question a sa place dans l’étude de la nature où cela sera plus abondamment expliqué, et où l’on fera voir en même temps qu’en dehors de l’idée il n’y a ni affirmation ni négation ni aucune volonté.

[2Nota, quod hic non inquirimus, quomodo prima essentia obiectiva nobis innata sit. Nam id pertinet ad investigationem naturae, ubi haec fusius explicantur, et simul ostenditur, quod praeter ideam nulla datur affirmatio, neque negatio, neque ulla voluntas. Sp.

Dans la même rubrique

TRE - 33

L’idée vraie (car nous avons une idée vraie) est quelque chose de distinct de ce dont elle est l’idée : autre est le cercle, autre l’idée du (...)

TRE - 35

Il suit de là évidemment que la certitude n’est rien en dehors de l’essence objective elle-même ; c’est-à-dire que la manière dont nous sentons (...)