EI - Proposition 12

  • 2 avril 2004

De nul attribut d’une substance il ne peut être formé un concept vrai d’où il suivrait que cette substance pût être divisée.

DÉMONSTRATION

Ou bien en effet les parties dans lesquelles la substance ainsi conçue serait divisée retiendront la nature de la substance, ou bien elles ne la retiendront pas. Dans la première hypothèse chaque partie (Proposition 8) devra être infinie et (Proposition 6) cause de soi, et (Proposition 5) être constituée par un attribut différent ; ainsi d’une seule substance plusieurs substances pourront être formées, ce qui (Proposition 6) est absurde. Ajoutez que les parties (Proposition 2) n’auraient rien de commun avec leur tout, et que le tout (Définition 4 et Proposition 10) pourrait être et être conçu sans ses parties, ce que personne ne pourra douter qui ne soit absurde. Soit maintenant la deuxième hypothèse, à savoir que les parties ne retiendront pas la nature de la substance ; dès lors, si la substance entière était divisée en parties égales, elle perdrait sa nature de substance et cesserait d’être, ce qui (Proposition 7) est absurde. [*]


Nullum substantiæ attributum potest vere concipi ex quo sequatur substantiam posse dividi.

DEMONSTRATIO :

Partes enim in quas substantia sic concepta divideretur, vel naturam substantiæ retinebunt vel non. Si primum, tum (per 8 propositionem) unaquæque pars debebit esse infinita et (per propositionem 6) causa sui et (per propositionem 5) constare debebit ex diverso attributo adeoque ex una substantia plures constitui poterunt, quod (per propositionem 6) est absurdum. Adde quod partes (per propositionem 2) nihil commune cum suo toto haberent et totum (per definitionem 4 et propositionem 10) absque suis partibus et esse et concipi posset, quod absurdum esse nemo dubitare poterit. Si autem secundum ponatur quod scilicet partes naturam substantiæ non retinebunt, ergo cum tota substantia in æquales partes esset divisa, naturam substantiæ amitteret et esse desineret, quod (per propositionem 7) est absurdum.


[*(Saisset) : On ne peut concevoir selon sa véritable nature aucun attribut de la substance duquel il résulte que la substance soit divisible. Démonstration Si vous supposez, en effet, la substance divisible, les parties que vous obtiendrez en la divisant retiendront ou non la nature de la substance. Dans le premier cas, chacune d’elles devra être infinie (par la Propos. 8), cause de soi (par la Propos. 6), et constituée par un attribut propre ; et par suite, d’une seule substance il pourra s’en former plusieurs, ce qui est absurde (par la Propos. 6). Ajoutez que ces parties (en vertu de la Propos. 2) n’auront rien de commun avec le tout qu’elles composent, et que le tout (par la Déf. 4 et la Propos. 10) pourra exister et être conçu indépendamment de ses parties, conséquence dont personne ne peut contester l’absurdité. Dans le second cas, c’est-à-dire si les parties ne retiennent pas la nature de la substance, il en résultera que la substance, quand on la divisera tout entière en parties égales, perdra sa nature et cessera d’être, ce qui est absurde (par la Propos. 7).

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