EIII - Proposition 12

  • 6 mai 2004

L’Âme, autant qu’elle peut, s’efforce d’imaginer ce qui accroît ou seconde la puissance d’agir du Corps.

DÉMONSTRATION

Aussi longtemps que le Corps humain est affecté d’une manière qui enveloppe la nature d’un corps extérieur, l’Âme humaine considère ce même Corps comme présent (Prop. 17, p. II), et en conséquence (Prop. 7, p. II) aussi longtemps que l’Âme humaine considère un corps extérieur comme présent, c’est-à-dire l’imagine (même Prop. 17, Scolie), le Corps humain est affecté d’une manière qui enveloppe la nature de ce même corps extérieur. Aussi longtemps donc que l’Âme imagine ce qui accroît ou seconde la puissance d’agir de notre Corps, le Corps est affecté de manières d’être qui accroissent ou secondent sa puissance d’agir (Post. 1), et en conséquence (Prop. 11) aussi longtemps la puissance de penser de l’Âme, est accrue ou secondée ; et, par suite, (Prop. 6 ou 9) l’Âme, autant qu’elle peut, s’efforce d’imaginer une telle chose. C.Q.F.D. [*]


Mens, quantum potest, ea imaginari conatur, quæ corporis agendi potentiam augent vel juvant.

DEMONSTRATIO :

Quamdiu humanum corpus affectum est modo qui naturam corporis alicujus externi involvit tamdiu mens humana idem corpus ut præsens contemplabitur (per propositionem 17 partis II) et consequenter (per propositionem 7 partis II) quamdiu mens aliquod externum corpus ut præsens contemplatur hoc est (per ejusdem propositionis 17 scholium) imaginatur tamdiu humanum corpus affectum est modo qui naturam ejusdem corporis externi involvit atque adeo quamdiu mens ea imaginatur quæ corporis nostri agendi potentiam augent vel juvant tamdiu corpus affectum est modis qui ejusdem agendi potentiam augent vel juvant (vide postulatum 1 hujus) et consequenter (per propositionem 11 hujus) tamdiu mentis cogitandi potentia augetur vel juvatur ac proinde (per propositionem 6 vel 9 hujus) mens quantum potest eadem imaginari conatur. Q.E.D.


[*(Saisset :) L’âme s’efforce, autant qu’il est en elle, d’imaginer les choses qui augmentent ou favorisent ; la puissance d’agir du corps. Démonstration Tant que le corps humain est affecté d’une modification qui enveloppe la nature de quelque corps étranger, l’âme humaine aperçoit ce corps étranger comme présent (par la Propos. 17, part.2) ; et en conséquence, tant que l’âme humaine aperçoit quelque corps étranger comme présent, ou en d’autres termes (par le Scol. de la même Propos.), tant qu’elle l’imagine, le corps humain est affecté d’une modification qui exprime la nature de ce corps étranger. Or, il suit de là que, tant que l’âme imagine des choses qui augmentent ou favorisent la puissance d’agir de notre corps, notre corps est affecté de modifications qui augmentent ou favorisent sa puissance d’agir (voyez le Post. 1) ; et par conséquent (en vertu de la Propos. 11), la puissance de penser de l’âme est augmentée ou favorisée ; et partant (en vertu de la Propos. 6 ou Propos. 9), l’âme s’efforce, autant qu’il est en elle, d’imaginer ces sortes de choses. C. Q. F. D.

Dans la même rubrique

EIII - Proposition 13

EII - Proposition 17.
EIII - Proposition 9 ; EIII - Proposition 12.
Quand l’âme imagine ce qui diminue ou réduit la puissance d’agir du (...)

EIII - Proposition 13 - corollaire

Il suit de là que l’Âme a en aversion d’imaginer ce qui diminue ou réduit sa propre puissance d’agir et celle du Corps.
Hinc sequitur quod (...)

EIII - Proposition 13 - scolie

Nous connaissons clairement par là ce qu’est l’Amour et ce qu’est la Haine. L’Amour, dis-je, n’est autre chose qu’une Joie qu’accompagne l’idée (...)